Tu veux-tu savoir ? "Pourquoi rentrons-nous..."

3 avril 2020

Tu veux-tu savoir ? "Pourquoi rentrons-nous..."

19 mars 2020

Bon matin la famille, les amis et autres voyageurs,

Nous avons pris la difficile décision de rentrer en France, quelques mois plus tôt que prévu…

Le covid-19 a changé la donne. Nous anticipons la probable expansion de la crise et franchement, nous n’avons plus le goût de voyager dans ces conditions.

La découverte du Laos s'est soldé par trois jours dans la jungle en compagnie de Julie et Marie, rencontrée quelques semaines plus tôt sur la boucle de 4 jours de moto à Thakhek. Arthur et Lucie, un couple franco-belge que les filles ont rencontré un peu avant, rejoignent notre groupe. Et oui, quand on voyage, on lie des amitiés très rapidement.
Tu le sauras vite dans l’article qui y sera dédié !

En attendant essaye d’imaginer :
72 heures coupées du monde, évidement pas de wifi, aucun signal téléphonique… C’est exactement ce qu’on voulait !
Mais…
Nous n’avions pas du tout anticipé notre retour à la "ville" de cette façon…
Les laotiens se sont tous mis à porter des masques, on apprend que la France va être enfin en confinement, et les frontières commencent à se fermer…
Le changement a été radical en 3 jours !
Nous décidons de foncer en Thaïlande le plus vite possible, tant qu’on y est encore autorisé.
Et après quelques jours, nous annulons notre volontariat vers Paï , et achetons nos billets retour le 17 mars…
Contrairement à l’idée reçu, aucun rapatriement n’est encore organisé. Nous nous rapatrions tout seul, tant qu’on le peut et à nos frais. Les ambassades et le gouvernement français conseillent à tous leurs ressortissants de rentrer, mais n’aident en rien à l’organisation de ce voyage.

Cette décision a d’abord été collective. Depuis le trek dans la Jungle, nous voyageons avec nos quatre nouveaux amis, Arthur, Lucie, Marie et Julie. Il nous a semblé plus sage de continuer l’aventure ensemble, et de passer le temps de quatorzaine et la probable extension de confinement en groupe dans le Gers.
Les parents de Marie nous laissent très gentiment une maison vide, et loin de tout. Ils sont assez généreux et ouvert d’esprit pour laisser leur maison à leur fille et 5 inconnus. Et comme si cela ne suffisait pas, ils nous ont fait un réapprovisionnement !
Nous aurons donc le luxe de passer cette période de confinement à la campagne, près de la nature et entre amis !

Ne te méprends pas, le risque que l’un de nous soit porteur est quasi nul !
En effet, il y a très peu de cas dans les pays que nous avons visité.
Nous avons la chance d’avoir une place où nous croiserons très peu de personnes, et où nous serons en sécurité.
Si nous sommes porteur malgré tout, pourquoi prendre le risque de contaminer nos proches ?
Ne t’en fait pas, nous te verrons très vite dès que la crise sera passée !

Alors pourquoi rentrer ?

Ce n’est pas pour profiter de notre excellent système de santé, au besoin…
Les hôpitaux étaient déjà surchargés avant la pandémie, nous savons que les soignants n’ont pas les moyens de se protéger depuis quelques jours. Nous n’en sommes qu’au début de la crise, et ces héros sont déjà à bout de forces, et de moyens…

Ce n’est absolument pas parce que nous nous sentons en danger ici… La France est actuellement beaucoup plus dangereuse que la Thaïlande.
Il y a encore très peu de cas et de victimes ici. Même s’il faut bien reconnaître que la situation risque de changer très vite.

Non, nous rentrons parce que nous ne voulons pas participer à l’aggravation de la situation pour les locaux.
Eux n’ont pas accès aux mêmes soins que nous, même si nous devions nous faire soigner chez eux !
Il faut aussi reconnaître qu’avec les pays qui ferment leurs frontières les uns après les autres, il devient presque impossible de poursuivre le voyage.

Et même si nous pouvions renouveler notre visa en Thaïlande, à quoi bon ?
Pourquoi rester ici si nous limitons nos déplacements ? Pourquoi rester et se sentir jugé ou rejeté ?
Voyager n’a plus la même saveur actuellement.

Nous sommes de plus en plus regardé bizarrement (et c’est bien normal), les locaux ne peuvent pas savoir que nous sommes en Asie depuis des mois, et donc ne sommes sans doute pas porteurs du virus (l’épicentre étant en Europe selon l’OMS).

Les guesthouses et auberges de jeunesses au Vietnam refusent depuis quelques jours les « westerns » que nous sommes. Ca finira bien par arriver dans les pays limitrophes.

Comment les blâmer quand on sait que des européens pouvaient encore arriver en Asie quelques jours auparavant. Ces inconscients pourraient propager le virus dans ces pays qui ont encore moins les moyens de le combattre qu’en France !
Tout ça pour ne pas décaler des vacances ou un simple départ à l’étranger…
L’égoïsme et l’insouciance de certains nous font peur pour notre sécurité.
C’est paradoxalement l’inconscience d’une minorité qui nous a convaincu de rentrer.
Nous ne sommes tout simplement plus ici à notre place, pour le moment.

Ici le racisme anti-blanc pourrait s'accentuer chaque jour un peu plus, comme les gens d’origine asiatique ont subis cette ignominie en France durant le début de l’épidémie.

Le premier ministre thaïlandais a déclaré que les étrangers qui ne portaient pas de masques devraient être viré du territoire ! Il a présenté ses excuses depuis, mais cela démontre bien comment les locaux peuvent nous percevoir.
Dans le train pour rejoindre Bangkok, un militaire nous a pris en photo sans notre consentement. Nous pensons que c’est parce que nous ne portions pas de masque.
Il n’a évidemment pris que les étrangers sans masque et a omis les locaux (même s’il faut avouer que peu ne portaient pas de masque).
Est-ce pour son album photo perso ? Est-ce pour démontrer que les blancs ne respectent rien ? La seule chose certaine est que le pouvoir des images est incommensurable !

Il est certain que c’est une des première fois de notre vie qu’un évènement va nous priver (un peu) de liberté et de confort aussi longtemps.
Avant de faire tes courses tous les jours, demande toi si c’est vraiment dramatique de manger des pâtes quelques jours d’affilés…
As-tu vraiment la nécessité de sortir ? Prendre le risque d’être contaminé ou de contaminer quelqu’un ?
Si nos soignants sont mal équipés, qu’en est-il des caissiers et de ceux qui bossent dans la distribution ? Eux, n’ont pas d’autre choix que d’aller travailler.

Une belle vague de solidarité se forme autours du personnel soignant. Leur réponse est clair et sans appel : Si tu veux aider, restes chez toi ! Et si tu dois vraiment sortir, fait le le moins possible et en respectant les gestes barrières.
Ils doivent être fatigués, n’ont pas les moyens matériels d’endiguer la pandémie, certains sont sans doute contaminés et continuent quand même de lutter contre le corona.
Alors que nous avons juste à rester cloîtrer quelques semaines pour véritablement les aider !

Comme l’a dit un de nos amis, nous devons sortir de cette crise plus forts, et cela commence par la solidarité.
Beaucoup d’entraide se développe entre voisins, personnes à mobilité réduite ou âgées, et les petits commerçants, un peu partout en France.
C’est très bien, mais ce qui serait magnifique, c’est que cet élan résiste au virus et perdure longtemps après cette crise sanitaire.

Peut-être est-ce le bon moment de repenser notre consommation, la façon dont nous voyons l’économie et cette société qui nous rend chaque jour de plus en plus individualiste ?
Des spécialistes nous alertent depuis des décennies autours de ces sujets…
Peut-être est-ce le moment d’y réfléchir plus profondément ?

Prends soin de toi et de tes proches, nous pensons à toi alors que nous rentrons au pire moment chez nous.
Bon courage, le confinement forcé n’est pas dans nos habitudes. Et tout le monde n’a pas notre chance de le passer dans un espace suffisamment grand, encore moins avec un jardin et des amis.